Maisons de Madagascar






Découvrez les Néo-favelas, nouvelles championnes de l’architecture vernaculaire


Comme dans beaucoup de villes de l’hémisphère sud, les grandes villes de Madagascar se retrouvent au début du 21è siècle envahies par les constructions bâties avec des matériaux dits « pauvres » comme des planches, des bouts de bois et de métaux ou avec des matériaux comme les briques, les pierres ou le béton qui suivent rarement les règles de mise en œuvre des constructions conventionnelles. Tout le monde sait que c’est la situation économique des pays du sud qui a conduit les populations qui y vivent à construire à la va-vite pour combattre le manque de logements, qui est un problème global mais combattu par différents moyens selon les pays et les zones considérés.


Pour le cas de Madagascar, ces habitats de fortune ont connu une mutation suivant l’évolution des mœurs et la croissance des concentrations des populations urbaines des villes. Finies les favelas en planches des années 80 qui pullulaient dans les capitales des provinces de la grande île. Nous sommes actuellement à une sorte d’embourgeoisement de ces constructions sensées appartenir aux pauvres et aux quartiers pauvres. Notre époque actuelle connait une transformation telle que ces quartiers se sont mués en quartier de la survie, donc de la débrouillardise. L’architecture de l’habitat y a aussi connu une transformation car les maisons ont pris des couleurs, chose impensable dans les années 90. Si on lève un peu les yeux en parcourant les quartiers d’Antananarivo, on constate la prolifération des façades colorées qui redonnent vie à ces quartiers qui hantaient la réputation de la capitale. Certes, les déchets sont toujours là, ostentatoires même dans certains endroits, mais beaucoup de zones ont dépassé l’incapacité chronique des quartiers populeux à tenir une propreté décente et ont fait de leur quartier un élément de fierté pour les gens qui y habitent. Maintenant, habiter dans les bas quartiers ne signifie plus pauvreté intellectuelle ou pauvreté tout court, ou pire être exclu de la vie sociale et culturelle du pays. Ces quartiers ont créé une sorte d’écosystème qui ne dépend qu’à lui même et qui est étonnement indépendant du système de l’administration centrale des villes. Toutes les villes de Madagascar connaissent ce phénomène et se retrouvent même surprises par cette prise en main spontanée des « anciens pauvres » de la vie de leur société.

La conséquence directe et palpable que nous mettons ici en exergue est la mutation totale de l’architecture des maisons des quartiers des grandes villes. Ces maisons qui ne craignent pas les contraintes techniques selon qu’elles se trouvent sur les pentes raides ou dans les quartiers inondables. Les habitants et les constructeurs locaux trouvent toujours des solutions plus ou moins durables faces aux problèmes posés par les sites : pilotis et dalles suspendues dans les bas quartiers, les murs de soutènements en granites pour les quartiers en pente, les superpositions des constructions dans les zones exigües sans que cela ne pose des problèmes juridiques ou de rapports sociaux pour les occupants de chaque coté des constructions. C’est le grand retour de l’architecture vernaculaire, celle qui est conçue par les gens, ceux qui y vivent et qui connaissent leurs propres quartiers. Les règles administratives et les contraintes juridiques et communales n’y ont cour que si les entités qui sont concernées le décident. De même, les administrations sont rarement mises au courant des évènements qui y surviennent.



En tout cas, nous sommes témoins de l’inventivité des constructions et surtout de l’audace de nombreux projets situés dans les quartiers considérés aujourd’hui à tort de « bas quartier ». Selon les personnes qui nous ont abordés, ils sont maintenant heureux d’y vivre, malgré que l’insécurité n’y ait pas totalement disparu. Leurs enfants sont passés du dénuement total des années 90 à la situation de possession qui dépasse l’entendement : ils arborent fièrement des téléphones portables et lecteurs MP3, ils se montrent avec un look emprunté directement à leurs idoles à la télé ou surtout sur internet, un autre intrus qu’ils consomment sans modération dans les cybercafés qui s’implantent dans les moindres ruelles des villes. Les maisons y ont repris goût à la vie avec des façades très colorées.

La récente publication de l’INSTAT confirme que la hausse du nombre de la population malgache, plus de 21 millions, témoigne de l’amélioration des conditions de vie générales mais sans superlatif, car la majorité vit toujours dans la pauvreté.